Strip and Play (Introduction)

Tout se jouait ce soir. Cette première course dans les Ombres serait couronnée de succès. Elle pourrait tout autant être leur dernière balade.

Le vieil orc au sourire moqueur les avait rassemblés deux nuits auparavant. Un simple message que le filtre anti-spam de leur commlink n’avait pas jugé bon d’arrêter. Une heure, un lieu.

Chacun s’était préparé avec attention, veillant à respecter les quelques consignes glanées à l’occasion d’une recherche dans les coins détournés de la Matrice. Laisser l’artillerie lourde à la maison mais prévoir tout de même une mauvaise surprise. Arriver à l’heure tout en ayant repéré les lieux. Avoir l’air décontracté bien qu’il s’agisse, de fait, d’un vrai baptême du feu.

Les blogueurs du Nexus n’avaient en revanche pas mentionné la pluie chaude et légèrement acide qui coulait sournoisement au creux de la veste en kevlar. Ni la contraction d’estomac, empreinte d’un frisson glacé, lorsqu’un véhicule blindé de la Lone Star s’arrêtait au feu juste derrière vous, avant de tourner à la prochaine à droite.

Seul le nain était arrivé en retard, mais les grenades rouillées à sa ceinture avaient incité les autres à garder pour eux tout éventuel reproche. Ils ne s’étaient encore jamais croisés, ni ne s’étaient trouvés dans une telle situation. Chacun avait tenté d’être discret lorsqu’il avait dévisagé ses futurs comparses.

Le silence avait perduré jusqu’au grincement qui les fit sursauter. Ils avancèrent, maladroits et gênés, dans la pièce désormais accessible. Le contraste était saisissant. La crasse du couloir et les fissures des murs couverts de tags avaient cédé la place au luxe clinquant d’un bureau digne d’un cadre supérieur de Horizon.

La suite se passa simplement, comme si basculer dans les Ombres était finalement chose facile. Le briefing terminé, ils se réunirent autour d’un verre, dans un bar où ils n’auraient jamais osé poser les pieds quelques jours plus tôt. Il disposait de quarante-huit heures pour faire connaissance et apprendre à fonctionner ensemble.

Ils verraient cette nuit s’ils avaient bien travaillé.